Tenerife dans le sillage…
C’est reparti pour de nouvelles aventures, en route vers les îles suivantes ! Nous sommes mi-novembre 2008, et une nouvelle fois, nous larguons les amarres, hasta luego Tenerife ! Quelle île ! Nous avons le sentiment de n’avoir pas vu 10% de ce que nous aimerions voir, mais le temps s’écoule. Et quand il faut y aller…
En route pour La Gomera ! Elle se trouve toute proche mais nous prévoyons de passer la nuit en mer, le vent étant très faible. Au départ nous sommes sous voile mais dès que nous arrivons dans le sud de l’île, abrité par le volcan Teide, le vent tombe complètement.
(Si vous avez raté l’article précédent c’est par ici : 2.4 Escale à Tenerife).
Tenerife s’éloigne doucement dans le sillage que nous traçons donc au moteur. Nous contemplons d’en bas cet incroyable volcan, plus de 3700 mètres c’est balaise ! Un des trois plus grands de notre planète… Il y a de la neige sur le sommet ce qui rend la chose étonnante vu d’ici, car il fait bien chaud au niveau de la mer. Je rêvasse et me trempe les orteils assis sur la plate-forme à l’arrière de FIDJI pendant qu’Isa rédige son journal. Nous avons beau ralentir le moteur au minimum, nous allons arriver à La Gomera vers 3 heures du matin si ça continue. Qu’à cela ne tienne, il n’y a pas de vent et très peu de houle, nous le coupons.
Nous voilà donc au beau milieu de la nuit à la dérive entre Tenerife et La Gomera . Il y a quand même un peu de passage et nous restons vigilant. Nous voulons arriver vers 8 heures ce qui nous permet d’économiser une nuit de port. Nous constatons dès le lendemain que le port de La Gomera est tout à fait abordable (15 Euros/nuit)…
En tout cas, ces quelques heures de moteur nous permettent de faire tourner le frigo en mer. Car celui-ci consomme beaucoup trop d’énergie et nous sommes obligés de l’éteindre en navigation. (Je vous écrirai un petit dossier à ce sujet d’ailleurs) ! Bref, Isa ayant trouvé du mascarpone à Tenerife profite du frigo pour nous faire…un tiramisu que nous dégustons dans la soirée ! Et ouais !
Arrivée à La Gomera
Sur les conseils avisés de ceux qui la connaissaient, nous avons décidé de privilégier la visite de La Gomera par rapport aux autres îles des Canaries. Dès le début, nous avons droit à un accueil bien sympathique dans ce petit port bien abrité. Dès que FIDJI est correctement amarré et après un saut à la capitainerie nous partons réserver une voiture pour le lendemain. Nous visitons la ville « San Sebastian de La Gomera », d’où Christophe Colomb serait parti vers l’Ouest inconnu pour découvrir les Indes (voir la photo ci-dessous)…
Ambiance de petite cité balnéaire, centre historique, style espagnol, terrasses sympathiques…
Tour de l’île en Polo
Le lendemain, nous récupérons la voiture que nous avons loué pour 24h assez tard, à 10 heures : Ils ne sont quand même pas très pressés le matin ! Comme la nuit tombe complètement vers 18h00, cela ne nous laisse pas beaucoup de temps pour visiter l’île.
J’établis un plan de route grâce aux guides touristiques et si on veut tout faire, il ne faut pas traîner ! Nous suivons notre itinéraire sur les routes de montagnes de La Gomera dans une petite Polo. Dès les premiers kilomètres c’est incroyable, on se retrouve dans des canyons vertigineux, ça monte, ça descend…Au final on s’arrête tous les 100 mètres pour faire des photos : C’est superbe !
Nous faisons quelques balades en suivant le guide et nous sommes charmés ! Arrivés au nord de l’île vers 15 heures, panne de batterie d’appareil photo ! Évidemment ! On s’arrête dans un petit bar-restaurant local qui dispose d’une vue époustouflante sur Tenerife et le Teide. Nous prenons un verre et demandons à brancher l’appareil pendant une vingtaine de minutes…Nous repartons en trombe car le soleil descend vite…et on s’arrête 100 mètres plus loin pour refaire une photo…
Nous en avons pris plein les yeux
C’était trop beau et trop court. La nuit est arrivée trop vite et face à notre frustration nous décidons de nous lever tôt le lendemain. En effet, nous avons la voiture jusqu’à 10 heures, alors si on se lève à 6 heures, cela nous laisse un peu de temps pour nous balader encore un peu ! Nous mettons donc le réveil pour monter au sommet de La Gomera assister au lever du soleil. Sur le « alto de Garajonay » à près de 1500 mètres, la vue est époustouflante, le Teide se détache au loin et sort de la brume, c’est magnifique.
Un moment merveilleux qui reste profondément ancré dans nos mémoires.
Nous sommes presque à l’heure pour ramener la voiture, 10h10, le plein fait. Nous avons parcouru au total 200 km de route de montagne et notre conclusion c’est que : Nous reviendrons…Un jour !
C’était merveilleux et nous conseillons à tous ceux qui se demandent où passer leurs vacances de venir quelques jours à La Gomera. C’est un paradis tranquille pour les (bons) randonneurs, mais même en voiture c’est génial car les routes sont d’une qualité irréprochable (encore une fois la Martinique ferait bien de prendre exemple).
Ils ont travaillé dur pour ce réseau routier, et ça continue…Toute l’infrastructure est récente (l’aéroport et sa piste n’ont pas 10 ans) ! Voilà un archipel qui mise sur le tourisme et qui met les moyens pour que ça fonctionne. Regardez un peu le ferry – navette qui circule entre La Gomera et Tenerife, ça envoie du lourd !
Ce qu’Isa écrit dans son journal au sujet de cette île magnifique :
« Vous avez sûrement déjà joué avec les images différentes que nous propose le kaléidoscope : Les couleurs se marient entre elles et les formes deviennent des compositions géométriques parfaites et difficilement reproductibles…Et bien voici La Gomera : un kaléidoscope de formations géologiques, de végétations hallucinantes, de couleurs, défiant les plus beaux arcs en ciel.
Où que vous soyez sur l’île, votre regard se perd dans l’infini beauté du moment. Non seulement vos yeux restent ouverts de peur d’en perdre une miette, mais tout votre corps se sent épris d’un vertige, comme grisé de beauté ! Celui qui sait apprécier la beauté trouve ici de quoi dépasser toute espérance car tout est là : la nature offerte sans restriction, l’espace infini, le ciel, la mer, et ce joyau. Pierre précieuse aux multiples facettes se jouant du temps et de ses volcans, se jouant des nuages en s’en abreuvant jusqu’à l’explosion de toutes les espèces végétales que le climat méditerranéen lui a confiée.
Elle est celle qui sait que l’on ne pourra jamais l’oublier. Elle sait que l’on reste toujours plus longtemps que prévu car elle nous envoûte. Elle a ce goût suave et corsé des bons vins, mais aussi des mets délicats qui nous font saliver et nous laisse ce désir d’y revenir par gourmandise !
La Gomera, tu nous as donné en quelques instants la certitude que nos chemins se recroiseront, tu nous as comblé par ta beauté ! Que tous ceux que tu accueilleras te respectent et t’honorent comme nous espérons le faire à travers ces mots écrits pour te remercier de nous avoir laissé pénétrer dans ton paradis ! »
Mouillages du sud et sud-ouest de la Gomera
Nous passons encore deux jours dans cette chouette petite marina. Bricolage, rangement, courses, internet, la routine du ponton. Isa trouve que c’est quand même agaçant d’avoir toujours quelque chose à bricoler sur un bateau et préfère chausser ses baskets et aller visiter encore les environs.
Mais nos obligations ne se sont pas envolées et il faut partir, continuer la route. Nous quittons le port, contournons l’île par le sud et ne résistons pas à l’appel de quelques mouillages près de Vale Gran Rey. Des falaises abruptes, une eau claire…Nous jetons l’ancre à proximité d’une ancienne conserverie de poissons dans une anse nommée la Cala Cantera. Les installations abandonnées et en ruine permettent d’amarrer l’arrière du voilier face à la légère houle qui pourrait le faire rouler. Nous nous baignons nus dans cette mer de plus en plus transparente. Pour la première fois depuis le départ, nous sortons les masques et tubas ! Nous observons alors quelques poissons aux allures tropicales ! Les tropiques ne sont plus très loin c’est bon signe !
Il faut noter, comme vous le constatez sur les photos, le contraste impressionnant entre la côte sud, particulièrement sèche et la côte nord, plus humide et verdoyante. Comme Tenerife, La Gomera offre des paysages variés.
Pour finir en beauté, nous repartons et mouillons directement à Valley Gran Rey pour la nuit. Au matin, séance d’aquagym dans une eau exceptionnellement claire sous des falaises rouges de 600 mètres de haut. On n’est pas mal là !
Nous allons ensuite nous amarrer sur la digue pour nous mettre en quête d’une recharge de gaz supplémentaire, sans succès mais nous avons de la marge, nous verrons plus tard.
El Silbo Gomero
Pour finir, un mot au sujet de deux éléments importants du folklore local. Tout d’abord, « El Silbo Gomero ». Il s’agit du langage sifflé des habitants de La Gomera, capables de communiquer comme les oiseaux !
Je vous ai sélectionné une petite vidéo de 10 minutes de l’Unesco sur ce sujet, vous êtes près pour un petit tour à La Gomera : El Silbo Gomero
Étonnant non ? N’hésitez pas à écouter aussi la chouette chanson de Féloche : El Silbo.
Le Salto Del Pastor
Le Salto Del Pastor quant à lui est une technique utilisé depuis des siècles aux Canaries. Elle permet de se déplacer, à l’aide d’une longue perche, dans les vertigineux ravins, précipices et crevasses que l’on trouve chez eux !
Je vous ai également trouvé une petite vidéo de 4 minutes cette fois, qui explique cette technique qui fonctionne drôlement bien : Le Salto Del Pastor
En route pour El Hiero
Nous quittons définitivement La Gomera et Vale Gran Rey à 11h, nous sommes le 17 novembre 2008. Et vous l’aurez compris c’est donc avec une grosse envie d’y revenir que nous quittons notre ’’kaléidoscope’’.
Cap sur El Hierro, dernière et courte étape avant la traversée pour le Cap Vert. Une traversée tranquille de 35 Milles au moteur dans la pétole, c’est le calme plat. Mais nous savons où nous sommes, les Canaries sont ventées, cela ne va pas durer ! Nous arrivons à 17h30 et nous sommes invités à nous amarrer sur un gros quai en béton : Bienvenue à El Hiero, dans le « Puerto de la Estaca » !
Nous passons deux nuits dans ce nouveau port aux installations succinctes. La houle pénètre et les pare battages ont assez souffert pour protéger Fidji du frottement contre le quai. L’un d’eux éclate d’ailleurs.
Nous prenons le bus et effectuons une visite rapide de la « capitale » de l’île qui se trouve en altitude, Valverde. Du coup nous trouvons le moyen d’avoir froid. Nous faisons quelques petites courses supplémentaires de produits frais, la traversée en voilier est estimée à 6 ou 7 jours pour rejoindre les îles du Cap Vert, on prévoit en conséquence…
Valverde est un peu dans les nuages, mais l’activité est partout, les gens vaquent à leurs occupations quotidiennes. On voit bien que nous sommes arrivés dans un endroit authentique peu fréquenté par les touristes. Mais encore une fois, nous nous y sentons les bienvenus, les installations sont propres et bien entretenues, un regard sur l’architecture et le terrain de foot montre que nous avons affaire à des gens soigneux qui aiment leur ville et leur île.
El Hierro est l’ile la moins touristique des Canaries, elle dispose de nombreuses randonnées balisées en altitude qui ont l’air grandioses, le réseau des bus et des routes est encore une fois tout neuf et impeccable, ça se construit, ça se développe, de grands travaux sont en cours…Nous sommes à nouveau hyper frustrés de devoir repartir si vite, mais une excellente fenêtre météo se profile pour notre traversée, il s’agit de ne pas la rater.
Dans le port, un autre voilier fait escale, celui de Jean et Liliane. Ce couple retraités croisiéristes nous invite à l’apéro sur leur propre Ginfizz superbement aménagé d’après leurs plans…Cela me donne quelques idées d’ailleurs !
El Hiero, une île à l’avant-garde, un modèle pour toutes les autres îles du monde !
Nous ne le savions pas lorsque nous y étions en 2008, mais de grands travaux venaient de commencer. Des travaux qui allaient faire d’El Hiero une île unique au monde. En effet El Hierro est la première île sur cette planète à avoir réussi, grâce aux énergies renouvelables, à se construire une véritable autonomie énergétique ! Elle est aujourd’hui autonome à 100 % !
Il faut absolument regarder comment ils ont fait pour gérer le coté aléatoire des énergies renouvelables. En fait c’est grâce à quelques décideurs politiques courageux, intelligents et obstinés et à une « centrale hydro éolienne » unique au monde ! C’est tellement malin, tellement logique, tellement génial…Pourtant ils n’avaient vraiment pas toutes les cartes en main pour réussir : éloignement, manque cruel d’eau douce…
Quand je pense à toutes ces îles qui vivent dans la dépendance au fioul : La voilà la solution, elle est sous nos yeux, en fonctionnement à EL HIERRO ! Qu’on ne nous dise plus que ce n’est « pas possible », basta les pessimistes, prenez des notes !
Pour en savoir plus, regardez cet enthousiasmant petit documentaire de 13 minutes : ARTE Future El Hierro. Pour nous c’est une bonne raison de plus de revenir aux Canaries !
Bye bye les Canaries – Une semaine de traversée à venir
Nous gardons, encore bien des années plus tard un souvenir très fort des Canaries. Depuis notre arrivée à La Graciosa, nous avons découvert un superbe archipel ouvert sur le tourisme, avec des installations qui tiennent la route, en particulier un réseau routier et de transport très développé. Nous partons avec la sensation de ne pas y être restés suffisamment. Nous ne sommes pas dupes pour autant du fait que nous portons là le regard superficiels de touristes de passage : Il y a toujours des facettes cachées dans ce genre de tableau. Mais bref, nous avons adoré les Canaries et espérons vraiment y retourner un jour…
Pour l’heure la fenêtre météo se confirme, nous hissons les voiles pour une dernière traversée avant la vraie de vraie : La traversée de l’océan Atlantique ! Elle approche ! En attendant, cap sur « Cape Verde », le pays de Cesaria Evora !
De El Hierro au Cap Vert il y a 800 NM (env 1500 km), une semaine de mer, ce n’est rien, allez hop ! En route un événement nous attend, il est de taille dans mon esprit de « fils du soleil » : Nous allons enfin couper la latitude, nous allons sous les tropiques ! À nous l’hiver au soleil !
Mercredi 19 novembre, 9h10. Vent de nord-est 5 à 6 Beaufort, mer agitée, cap au sud matelot, au largue ! C’est la fête, vogue et glisse, beau FIDJI !
Ci-dessous une des rares photos de FIDJI sous voile prise de l’extérieur ! Elle a été prise par Jean et Liliane alors que nous quittions ensemble El Hiero pour le Cap Vert !
Patrick Belliot
Mata’i Nautisme
Pour le lire le prochain épisode, c’est par ici : 3.1 Cap sur les îles du Cap vert