Comme la plupart de ceux qui s’intéressent à la voile, je suis les aventures des frères Bourgnon, Laurent et Yvan, depuis longtemps.

Hier, au Pouliguen, j’ai rencontré Yvan Bourgnon. Cela m’a fait vraiment plaisir, d’autant que je suis ses aventures de près, comme je suivais celles de son frère. Je vous raconte ça ici.

J’avais dans ma chambre, dans les années 90, un poster du trimaran Primagaz, celui avec lequel ils ont gagné ensemble la transat Jacques Vabre. En 1997, je suis un BTS commerce international à Nantes et dans ce contexte, je dois effectuer deux stages professionnels à l’étranger. Bien sûr, je souhaite les faire dans le domaine du nautisme, ma grande passion déjà à l’époque.

C’est ainsi que j’ai rencontré Laurent Bourgnon. En effet, j’ai effectué ces fameux stages dans une société allemande qui fabriquait des cordages nautiques. Cette société s’appelait FSE, et il se trouve qu’elle était un des sponsors de Laurent Bourgnon et du trimaran Primagaz. Celui-ci était équipé avec les meilleurs cordages FSE.

Le trimaran Primagaz

Prise de conscience du problème des plastiques

10 ans plus tard, en 2008, Isabelle et moi entamons notre grand voyage en voilier. Nous sommes déjà plus ou moins conscients que quelque chose ne va pas avec les plastiques. Mais ce que nous voyons en cours de route dépasse tout ce que nous avons pu imaginer.

Arrivés en Martinique, il suffit de se balader sur la côte au vent pour voir des quantités incroyables de plastiques rejetés par la mer. La plage en est jonchée, nous en sommes affligés.

Par la suite, nous arrivons dans l’archipel des San Blas, Kuna Yala, à Panama. Dans ce qu’on pourrait aisément qualifier de « paradis sur terre ». Mais le désastre avec le plastique est le même. Nous sommes fortement choqués par tout ce plastique que nous trouvons partout.

Le jour de nouvel an 2010, nous passons même plusieurs heures à ramasser les déchets plastiques sur un îlot des San Blas, à Coco Bandero. Mais une fois dans les sacs, nous ne savons pas quoi en faire…Des plaisanciers aillant pris l’habitude de brûler leurs déchets nous affirment que c’est la solution. Mais nous apprendrons par la suite que c’est une mauvaise idée : En effet les gaz qui s’en échappent sont très toxiques et ne doivent pas être diffusés ainsi dans l’atmosphère.

Ci-dessous, une photo prise en Martinique. Nous avons baptisé cette oeuvre superbe : « l’arbre à plastique ».

L'arbre à dechet - Martinique

Passage à la radio – Arrivée en Polynésie

Depuis notre passage en Martinique et en Guadeloupe, nous intervenions régulièrement à la radio sur France-Inter, dans l’émission d’Éric Lange, « Allô La Planète ». Nous y dénonçons la situation au sujet du plastique et lançons même le projet de récolter des « photos moches ». Je me disais que collecter un maximum de photos choquantes pourrait peut-être, à travers quelques films ou conférences, alerter et aider à la prise de conscience de l’ampleur du problème.

Lorsque nous arrivons en Polynésie Française, malgré la taille immense de ce territoire et la faible densité de population, cela ne s’arrange pas. Bon il y a quand même un point positif : Les grandes bières, les « obus » de Hinano, sont consignées. Tout le monde les ramène et on n’en trouve pas dans la nature. Cela dit, les canettes en alu et le reste des plastiques s’entassent par -ci par-là un peu partout. Y compris dans les paradis les plus reculés le problème nous saute aux yeux.

Trois ans et demi dans le lagon de Raiatea-Tahaa

C’est là, à Raiatea, que ma route croise à nouveau celle de Laurent Bourgnon. 15 ans après Primagaz et mes stages chez FSE. À ma grande surprise, il prétendait se souvenir de moi…(peut-être voulait-il juste me faire plaisir mais peu importe). En tout cas je me rappelle nos discussions, en particulier au sujet de son nouveau bateau, Jambo (cela me paraissait incroyable de le voir sur un bateau à moteur). Il tenait à m’expliquer pourquoi il avait fait ce choix pour voyager en famille. Il avait une foule d’arguments pragmatiques à m’opposer quand je levais le sourcil, c’était vraiment sympa de discuter avec lui. Nous parlions également de la vie à Raiatea, car en effet, nous étions voisins au mouillage d’Apooiti.

Mes premiers montages vidéo – System of a Down – Plastic Everywhere

Nous sommes alors en 2011 – 2012, nous venions de créer Mata’i Nautisme, notre école de voile. Je crée alors aussi mon premier site Internet, me mets doucement à la photo et monte mes premières vidéos avec les moyens du bord, gratuits autant que possible.

Et parmi mes premières vidéos, comme convenu avec Éric Lange et les auditeurs d’Allo La Planète, j’en réalise une spéciale pour les plastiques. J’y colle une musique trash qui dézingue le système, « Fuck the System » du groupe System of a Down. Car je dénonce moi aussi ce système qui se détruit lui-même et nous avec. Il lui en faut toujours plus et plus et plus et plus, sur une planète aux ressources naturelles limitées. Il est évident qu’on ne peut pas continuer ainsi. C’est l’époque où je commence à mesurer l’ampleur du problème, grâce à quelques documentaires comme par exemple « Prêt à jeter ».

Attention, ça décoiffe un peu, réglez le volume à votre convenance :

Le problème est « systémique » – Besoin de sens et envie d’engagement

Je ressens mon impuissance, j’ai envie de travailler, de m’engager, de m’unir, de faire quelque chose avec ceux qui agissent concrètement pour changer les choses. Mais je ne sais pas comment faire.

Les années ont passé, nous voilà déjà en 2018 et je n’ai toujours pas vraiment trouvé comment faire plus. J’écris régulièrement des articles sur le sujet, je signe des pétitions, je m’informe beaucoup, partage les articles sur les réseaux sociaux, je vote pour changer de système…Mais je cherche toujours un moyen pour être plus efficace et concret. D’autant que les scientifiques tirent la sonnette d’alarme de plus en plus fort, nous sommes en pleine extinction de masse, il FAUT réagir.

C’est la raison pour laquelle j’observe beaucoup les initiatives des uns et des autres. Comme le projet du bateau Manta et « The Sea Cleaners », par exemple.

Les aventures d’Yvan Bourgnon sur Ma Louloute

Comme beaucoup, j’ai suivi les aventures d’Yvan Bourgnon de près, tout en me demandant pourquoi il se mettait dans de telles situations. Pourquoi prendre de tels risques ? Pourquoi se lancer dans des choses aussi difficiles, que moi-même j’aurais volontiers qualifiées d’impossibles… ?

Il m’est arrivé d’écrire des articles sur ma page Facebook à son sujet. Son « Cap Horn en catamaran de sport », son incroyable tour du monde, Ma Louloute explosé sur les cailloux du Sri Lanka…reconstruit quelques mois plus tard pour un nouveau départ…Et bien sûr son défi fou de doubler le passage du nord-ouest, dans les glaces de l’arctique, toujours seul à bord de Ma Louloute, catamaran sans cabine de 6,50m…

Vous l’imaginez coincé dans les glaces dans la tempête polaire ce frêle esquif ?

Yvan Bourgnon à bord de Ma Louloute

Yvan Bourgnon a réalisé DES TRUCS DE FOUS.

Le projet « The Sea Cleaners »

Quand j’ai découvert le projet du bateau « Manta », je me suis dit que cela ne serait pas possible. Un bateau pour ramasser les plastiques dans l’océan ? N’importe quoi ! L’océan est trop grand, le bateau, même grand, sera forcément trop petit. Ce sera trop cher. C’est trop ambitieux. C’est…Impossible !

Et puis je me suis repris.

Je me suis dis : « Attends, c’est Yvan Bourgnon qui propose ce projet. Les projets soi-disant « impossibles » il connait, mieux vaut se garder de porter un jugement hâtif. Le bougre est bien capable de réussir ! ».

Juin 2018, rencontre avec Yvan Bourgnon au Pouliguen

Comme vous le savez peut-être si vous suivez nos aventures, nous sommes en ce moment pour quelques mois en métropole. Nous avons laissé notre voilier FIDJI en Nouvelle Calédonie et sommes de retour chez nous depuis une dizaine de jours.

En attendant nos premiers stages de voile dans le Morbihan qui commencent la semaine prochaine, Isabelle est allée retrouver sa famille à la Rochelle. De mon côté, je travaille sur nos futurs livres et publications ainsi que sur le site internet de Mata’i Nautisme depuis le Pouliguen, Loire Atlantique, près des miens.

Et voilà ti pas qu’il y a quelques jours, ma mère me montre un petit article dans le programme du cinéma PAX du Pouliguen qu’elle a entouré pour moi :

« Dimanche 3 juin à 15h00, projection du film « En équilibre sur l’océan », en présence d’Yvan Bourgnon qui va venir présenter son projet « The Sea Cleaners ».

HA ! Alors là c’est dingue ! Génial hasard (certains prétendent qu’il n’y aurait pas de hasard ?) !

Mais qu’est-ce qu’il vient faire au POULIGUEN, au cinéma PAX, à moins de 2 minutes en vélo de chez moi ?

Et voilà. C’était hier, dimanche. Yvan est bien là et je suis sincèrement heureux de le rencontrer !

Le problème des plastiques dans l’océan, il l’a vu…en mer

À bord de Ma Louloute à ras des éléments, cela n’a sûrement pas été très agréable de se retrouver par endroit au milieu des immondices .

Yvan a donc décidé à son retour, après avoir vu ça, de fonder « The Sea Cleaners ». Voilà, son équipe et lui se bougent pour faire concrètement quelque chose.

Il utilise son image, ses réseaux, il bosse le projet et je commence à me dire que ça peut, que ça va marcher. Pour moi, qui cherche depuis tant d’année un angle d’attaque, voir tout ça m’inspire et me motive.

D’accord, le projet est très ambitieux. Et alors ? Yvan a tout ce qu’il faut pour réussir : De l’engagement, de la patience, du courage et de la détermination. Un brin de « folie » ?

Qui a dit déjà « C’est avec de la folie qu’on fait de grandes choses » ?

Et bien moi, si je peux aider ou contribuer à ce projet d’une façon ou d’une autre, ce serait avec plaisir.

Chers lecteurs, je vous tiens au courant, en attendant, je vous invite à découvrir www.theseacleaners.org

The Sea Cleaners

 

Patrick Belliot

Mata’i nautisme